Mame, une histoire du livre et de l'imprimerie en Touraine

Depuis l'implantation de la première imprimerie jusqu'à la reconversion de l'usine moderne en lieu de création et d'innovation, Mame s'inscrit dans une longue et riche histoire de plus de deux siècles. Composée de huit épisodes, la série propose de suivre les grandes étapes d'évolution de l'histoire de l'imprimerie en Touraine puis l'histoire de la famille Mame à Tours et enfin celle d'un patrimoine architectural contemporain méconnu.

Tours et les bords de Loire, un territoire de diffusion des idées - Mame, la série 1/8

En Touraine, le culte de Saint Martin, évêque de Tours mort en 397, favorise l’essor du livre dont l’usage est introduit en Gaule par les Romains. Tours devient, entre le VIe et le XIIIe siècle, un centre intellectuel de premier plan. La ville joue un rôle important dans la diffusion d’un nouveau modèle d’écriture incarné par la minuscule caroline. Pendant cette période, plusieurs centres religieux de Tours disposent de scriptoriums, de clercs et de bibliothèques qui contribuent à l’essor de la cité. L’arrivée de la cour royale sur les bords de Loire favorise la production de livres et de manuscrits richement enluminés. 

Vers une révolution, l'invention du caractère mobile - Mame, la série 2/8

À la fin du Moyen-Âge, la littérature laïque se développe dans les villes universitaires et les cours royales. Lorsque l’imprimerie apparaît, les livres richement enluminés laissent place à des ouvrages en noir et blanc. Cette invention venue de Chine a été perfectionnée par Gutenberg. Inventeur de la typographie, on lui doit l’idée de graver le caractère typographique dans l’acier (le poinçon) puis d’utiliser une matrice en cuivre pour y couler un caractère en « plomb ». La multiplication du livre permet son accès à un public moins aisé, mais l’édition reste sous l’emprise de la censure. 

Les grands noms de l'imprimerie en Touraine - Mame, la série 3/8

De nombreux personnages célèbres associés à l’imprimerie sont liés à la Touraine, comme Nicolas Jenson, maître graveur de la monnaie de Tours qui développe les caractères typographiques romains, Guillaume Rouillé, né à Tours vers 1518 et qui deviendra un important marchand-libraire à Lyon, ou encore Christophe Plantin, né à Saint-Avertin, qui part à Anvers pour créer la plus grande imprimerie d’Europe au XVIe siècle. Lors des siècles suivants, les imprimeurs familiaux se spécialisent dans des domaines précis (juridiques, administratifs ou ecclésiastiques). La famille Mame, à l’origine de l’imprimerie du même nom, exerce à Tours à la fin du XVIIIe siècle. D’abord spécialisée dans les éditions administratives, elle s’ouvre aux livres illustrés, notamment ceux à destination de la jeunesse. 

L’imprimerie Mame, six générations d’imprimeurs - Mame, la série 4/8

Six générations vont se succéder à la tête de l’entreprise Mame. Chaque génération contribue à construire ce qui va devenir, à la fin du XIXe siècle, une des plus grandes imprimeries d’Europe, installée dans le centre historique de Tours. La maison Mame cherche à maîtriser la totalité de la chaîne de production et développe l’usine en intégrant les différentes étapes du processus, depuis la fabrication du papier jusqu’à la commercialisation du livre. Cette spécificité, qui assure le prestige de la maison Mame, et la fabrication d’ouvrages scolaires garantissent l’équilibre économique de l’imprimerie. À partir de 1896, Mame devient imprimeur de la papauté. 

L’imprimerie Mame, une famille influente à Tours - Mame, la série 5/8

La dynastie des imprimeurs Mame marque durablement l’urbanisme de Tours. Le développement de leur industrie, qu’Alfred Mame (1811-1893) dirige, va de pair avec l’essor de la ville (arrivée du chemin de fer, assainissement, aménagement des boulevards) dont Ernest Mame est maire de 1849 à 1865. La famille Mame affiche alors sa réussite sociale par l’acquisition de biens immobiliers (hôtel particulier, châteaux), les succès politiques (Ernest devient conseiller générale puis député) ou en offrant aux salariés de l’imprimerie des avancées sociales (construction de la Cité Mame avec logements, jardins, crèches, assurance maladie…). 

L’imprimerie Mame pendant la Seconde Guerre mondiale - Mame, la série 6/8

En juin 1940, le centre-ville de Tours est dévasté par des obus incendiaires et l’usine Mame est entièrement détruite. À la fin de la guerre, la ville va faire l’objet d’un vaste plan d’aménagement qui intègre quelques grands édifices publics comme la bibliothèque ou l’école des Beaux-Arts. Dans le centre-ville, les nouveaux logements réalisés en béton bénéficient de tout le confort moderne (raccordement à l’eau et à l’électricité, salle de bain…). Alfred Mame (1909-1994), deuxième du nom, s’emploie à l’édification d’une usine contemporaine et prestigieuse. En compensation de la destruction de l’imprimerie et au titre des dommages de guerre, l’État donne à la famille Mame un terrain proche de la Loire, qui accueillait auparavant l’ancienne caserne de cavalerie. 

La reconstruction de l’usine moderne - Mame, la série 7/8

Pour construire la nouvelle imprimerie, Alfred Mame choisit Bernard Zehrfuss et Jean Prouvé, deux figures reconnues de l’architecture et de l’industrie. L’architecte Bernard Zehrfuss est spécialiste des structures en béton armé. Jean Prouvé incarne la synthèse entre l’art et l’industrie et développe des procédés de préfabrication et l’usage de matériaux légers. L’ensemble de la nouvelle usine se compose de trois éléments : l’imprimerie, le bâtiment administratif et le pavillon de la direction. À l’intérieur, l’espace de béton et de métal est adouci par les formes peintes de Bernard Pillet, sur les murs comme sur le sol. La lumière des sheds ou les couleurs témoignent de la volonté d’offrir aux ouvriers et aux ouvrières un cadre de travail de qualité. Elle obtient le prix de l’architecture industrielle au salon de Milan en 1954. 

Mame, une histoire qui se poursuit - Mame, la série 8/8

L’imprimerie Mame, dont l’activité cesse définitivement en 2011, accueille aujourd’hui Mame, Cité de la création et de l’innovation. Si sa composition générale est simple et fonctionnelle, un soin particulier est apporté aux détails. Sa réhabilitation signée par Franklin Azzi Architectures et réalisé par la Société d’Équipement de la Touraine (SET) respecte l’œuvre de ses concepteurs. Toutefois, la restauration des matériaux et structures de l’époque contemporaines est un grand enjeu, et nécessite des précautions. 

L'imprimerie Mame constitue un chef-d’œuvre unique de l'architecture industrielle moderne. En mars 2000, les bâtiments comprenant notamment les sheds, la tour de direction et son toit-terrasse ont fait l'objet d'une inscription à l'Inventaire supplémentaire des monuments historiques. 

Mame, la série, est une proposition de la Mission Val de Loire, en partenariat avec MASAO Productions et la Fabrique d'Usages Numériques pour Tours Métropole Val de Loire .