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Les limites d’un principe d’aménagement

Published on 23 May 2017

Le principe du rehaussement constant des levées fut régulièrement contredit par une crue plus forte et plus dévastatrice. C’est au XIXème que le principe d’aménagement et de protection a été modifié en faisant « la part de l’eau ».

« A vrai dire, la moitié du charme de la Loire tient à ce que l’on peut traverser la Touraine en suivant sa rive. La grande digue qui la protège, ou protège le pays de ses crues, de Blois à Angers, est une route admirable ; de l’autre côté également, la grand’route lui tient constamment compagnie. Un fleuve étendu, quand on suit une grand’route, est un excellent compagnon qui anime et raccourcit le parcours. » 

- Henry James, Voyage en France, 1884 

Dans la première moitié du XIXe siècle, la préoccupation dominante d’améliorer les conditions de navigation fait perdre la notion des limites au-delà desquelles il est dangereux de contrarier l’écoulement des grandes eaux. 

Les crues de 1846, 1856, et 1866 et leurs terribles conséquences renouvelèrent la prise en compte du problème. Ainsi, après la crue de 1856, le principe des digues insubmersibles est condamné. Devant l’impossibilité d’un nouveau rehaussement, l’ingénieur Comoy, élabore un nouveau plan de défense. La solution adoptée en 1867 intègre une grande nouveauté : les déversoirs modernes. Construits dans la partie supérieure des enceintes insubmersibles, ils prévoient la formation des brèches en ménageant au trop plein des grandes crues des issues vers des espaces peu ou pas construits du val. 

« Hier ruisseaux séparés par des îles de sable allongées, demain fleuve de démence qui force les murs de sa prison, cette Loire, on l’a malgré sa légitime résistance, incarcérée dans la geôle d’un nain, quand il lui fallait le préau d’un géant. » 

- Onésime Reclus, Le Manuel de l’Eau, 1910 

On ajoute dans la partie inférieure de certains vals endigués la construction de « reversoirs » répondant ainsi à l’aval aux déversoirs en amont. L’application de ce principe reste incomplète, des 19 déversoirs prévus par le programme de 1867, 7 furent réalisés. 

C’est sur la base de l’ensemble des ouvrages construits, renforcés ou modifiés au XIXème que se poursuit depuis le travail permanent qui a pour objectif la protection contemporaine du Val de Loire contre les crues. 

« Elle n’aime pas les hommes, disais-tu ? mais pourquoi les hommes la bravent-ils comme ils le font ? Jour à jour, ils lui volent son domaine. Là où elle coulait hier, ils viennent et sèment leur blé, plantent leur vigne et construisent leurs maisons. Ils ramassent l’argile limoneuse, le sable même qu’elle a laissé, les amoncellements sur sa rive et lui disent : tu ne passeras plus. (…) Que lui dirai-je, demain, si elle reprend son bien, et si, rentrant là-bas après la crue, je ne retrouve qu’un peu de vase à la place tiède où je dormais ? » - Le Père Jude 

- Maurice Genevoix, Rémi des Rauches, 1922